Mauritanie : deux lois adoptées contre la corruption, mais l’essentiel reste à faire!
L’Assemblée nationale a adopté, ce samedi, deux projets de loi majeurs destinés à renforcer la lutte contre la corruption et à promouvoir la transparence dans la gestion publique. Si ces textes traduisent une volonté politique affirmée, leur efficacité dépendra de leur mise en œuvre réelle dans un contexte où la corruption, loin de reculer, gangrène des secteurs clés — y compris celui de la justice, pourtant garant de l’État de droit.
Le premier texte, le projet de loi n°25-009, porte spécifiquement sur la lutte contre la corruption. Il rappelle que cette dernière constitue un obstacle majeur au développement économique et social, nuit à la croissance et mine la confiance des citoyens dans les institutions publiques. Il s’inscrit dans le cadre des engagements internationaux de la Mauritanie, notamment à travers la ratification des conventions de l’ONU et de l’Union africaine sur la lutte contre la corruption.
Le second, le projet de loi n°25-010, impose aux hauts responsables de l’État de déclarer régulièrement leurs biens et intérêts. Il prévoit la création d’une Commission pour la transparence financière dans la vie publique, chargée de recevoir, traiter et conserver ces déclarations. Ce mécanisme vise à prévenir les conflits d’intérêts et à renforcer la culture de la redevabilité.
Mais au-delà des textes, une question cruciale demeure : celle de leur application effective. Car en Mauritanie, comme dans de nombreux pays, le véritable défi n’est pas seulement de voter des lois, mais de garantir qu’elles soient respectées. Or, la réalité montre que la corruption s’étend parfois précisément là où la loi devrait être la plus scrupuleusement observée : dans le secteur de la justice.
Les citoyens, de plus en plus sceptiques, pointent du doigt des pratiques opaques dans les tribunaux, les retards dans les procédures, et parfois même des décisions influencées par des considérations extérieures au droit. Cette situation mine la crédibilité des institutions et rend d’autant plus urgente l’instauration de mécanismes de contrôle indépendants et efficaces.
Interpellé sur ces enjeux par plusieurs députés, le ministre de la Justice, Mohamed Mahmoud Ould Beyeh, a reconnu les défis structurels auxquels fait face le pays. Il a assuré que ces textes marquent un tournant dans la gouvernance publique et qu’ils visent à renforcer la confiance entre l’État et les citoyens.
Mais cette confiance ne se décrète pas. Elle se construit sur la base d’actes concrets, de sanctions exemplaires, et d’une justice qui s’applique à tous, sans exception. Autrement, même les meilleures lois resteront lettre morte dans un paysage institutionnel affaibli par les pratiques qu’elles prétendent combattre.