Sénégal : Le spectre de la cohabitation plane sur les Législatives
Agence Anadolu – Les deux principales coalitions de l’opposition ont scellé une alliance pour décrocher la majorité parlementaire.
Les électeurs sénégalais se rendent aux urnes dimanche pour des législatives qui s’annoncent indécises. Jamais d’histoire en effet, le scrutin pour l’élection des députés n’aura été aussi ouvert.
« Nous sommes dans le cadre d’élections très disputées. Elles sont également incertaines quant aux résultats ; ce qui est un gage de vitalité démocratique », croit savoir l’agrégé en sciences politiques, Maurice Soudieck Dione.
« Certaines (coalitions) émergent plus que d’autres : il s’agit de la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY), dans l’opposition il s’agit de Yewwi Askan Wi (YAW) et de la coalition Wallu Sénégal qui ont scellé un pacte au niveau des départements », a aussi relevé Dione.
Se dresse en fait devant la coalition présidentielle qui avait raflé 125 des 165 sièges lors des dernières Législatives (2017) une jonction inédite des deux principales forces de l’opposition.
Yewwi Askan wi (libérer le peuple) coalition dirigée par le député Ousmane Sonko et l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall et Wallu Sénégal (Secourir le Sénégal) avec comme tête de liste l’ancien président Abdoulaye Wade ont noué une intercoalition. Objectif : se soutenir stratégiquement dans les départements pour disposer de la majorité à l’assemblée et imposer la cohabitation.
Interrogés par Anadolu sur ce cas de figure qui pourrait intervenir, des candidats de la mouvance et de l’opposition y sont allés de leurs perspectives.
« La cohabitation c’est un temps de conflictualité entre les pouvoirs exécutif et législatif et cette conflictualité, nous n’en avons pas besoin. Nous avons besoin de stabilité et d’apaisement pour continuer notre marche vers le progrès », a averti le député Seydou Diouf, positionné à la 18 position de la liste de BBY.
« La cohabitation va permettre de mettre un terme à l’effondrement de l’état de droit dans ce pays, à la croissance exponentielle de la cherté de la vie. Si c’est cela qui veut dire blocage tant mieux », a rétorqué Omar Cissé, tête de liste départementale de YAW à Rufisque.
« La cohabitation est source de redressement pour ce pays », a-t-il poursuivi, assurant qu’une victoire de l’opposition va ainsi permettre d’annihiler la volonté du président Macky Sall de tenter un 3ème mandat.
« En période de cohabitation, le Gouvernement et le législatif seront contrôlés par l’opposition. Le Président de la République va devenir, selon la maxime de Gambetta, un monarque qui règne mais ne gouverne pas (…) Le président est obligé d’avoir l’accord de l’assemblée nationale pour l’adoption du budget », a énuméré entre autres le constitutionnaliste Ngouda Mboup pour donner une idée de ce que va engendrer une cohabitation.
Une seule chose est certaine, ce scénario inconnu jusque-là va avoir une incidence réelle sur la gouvernance du président Sall.
La meilleure performance à l’actif de l’opposition jusque-là notée remonte aux Législatives de 1993 lors desquelles 30% des sièges (36 sur 120) avaient été décrochés contre 84 pour la formation présidentielle.
-Dakar, mère des batailles
Après des périples dans les régions de l’intérieur du pays, les états-majors des principales coalitions ont rallié la capitale pour les trois derniers jours de la campagne électorale qui prend fin ce vendredi à minuit.
La plus importante région (5 départements) va pourvoir 18 députés à partir de la majoritaire dont 7 pour le département de Dakar.
Le maire de Dakar, tête de liste de la coalition YAW, part a priori avec la faveur des pronostics après sa victoire éclatante lors des Locales de janvier.
Pour autant la coalition présidentielle que dirige le ministre des pêches Alioune Ndoye a sorti les gros moyens pour inverser la tendance.
Entre débauchages de responsables de l’opposition et un focus mis sur les réalisations du président Macky Sall depuis le début de la campagne électorale, BBY fait le maximum tout pour s’assurer la victoire.
« Nous sommes sûrs de notre victoire et elle sera éclatante », a lancé jeudi à Rufisque (Dakar) Aminata Touré, ancien premier ministre et tête de liste nationale de la coalition présidentielle.
Du côté de YAW ce sont les principaux leaders pourtant privés de participation a cause du rejet partiel de la liste nationale qui mènent la campagne pour espérer imposer la cohabitation.
L’allié Wallu a annoncé jeudi l’arrivée vendredi de l’ancien président de la République Abdoulaye Wade absent du pays depuis plusieurs mois.
Une véritable caution morale pour cette coalition arrivée en 2eme position lors des dernières législatives.
L’alternative pour une assemblée de rupture (AAR Sénégal) dirigée par l’ancien ministre Thierno Alassane Sall et Bokk Guis Guis (vision commune) de l’ancien président de l’Assemblée sous Wade Pape Diop, proposent des alternatives aux électeurs.
Après la course aux voix entamée le 10 juillet, c’est au tour des quelques 7 millions d’électeurs de choisir les 165 députés du parlement pour les 5 prochaines années.
La CEDEAO et l’organisation de la francophonie ont dépêché des missions d’observation pour s’assurer de la bonne tenue de ces élections.
AA/Dakar/ Alioune Ndiaye