Le pays n’a pas besoin de cela… vendredi 19…
Le pays n’a pas besoin de cela…
vendredi 19 juin 2015
Le texte ci-après est le verbatim d’une discussion à bâtons rompus entre votre serviteur et un administrateur noir. A la retraite depuis des années, il a choisi de garder l’anonymat. Son dépit, sa déception et sa souffrance pour la Mauritanie d’abord et pour les siens ensuite méritent d’être soumis à votre lecture. Nous vous proposons tout cela. Libre à vous de juger et de vous en faire l’opinion qui vous convient…
« Sales temps pour les Négro-Mauritaniens
En accédant au pouvoir par coup d’Etat, en 2008, Mohamed Ould Abdel Aziz avait réussi, par un coup de maître, à s’allier ce qui faisait alors office d’avant-garde politique de la communauté noire du pays. Même des figures jusque-là insoupçonnées, longtemps enracinées dans l’opposition, à l’instar de Sarr Ibrahima, Kane Hamidou Baba et Balas (pour ne citer que ceux-là) ont toutes misé sur l’homme, rejoignant, du coup, les inamovibles soutiens de tous les régimes au sein de la communauté.
Certains ténors avaient même poussé leur témérité jusqu’à l’appeler « mon ami Aziz ».
Cette alliance contre nature entre un officier étiquette comme bras agissant des nationalistes arabes chauvins et des militants de la cause des opprimés noirs du pays intriguera plus d’un, reléguant les revendications essentielles de base (et Dieu sait qu’elles sont nombreuses) des négro-mauritaniens aux oubliettes. Ainsi, durant toute la crise constitutionnelle née du coup d’Etat, la majorité des élites noires s’investissait plutôt dans la légitimation de l’homme de Darou Mousty au détriment de l’homme des Niassène, le grand faiteur, Sidioca qui avait, contre l’avis de tout le système, engagé une véritable politique de réconciliation nationale dans le pays pour solder, de manière consensuelle, le lourd passif des années de braise.
Présenté comme la dernière incarnation en date du « renouveau de la Mauritanie », le tombeur du président arabe le plus populaire au sein de la communauté noire après Ould Daddah et Ould Haidalla, Mohamed Ould Abdel Aziz n’accordera aucun égard aux « engagés » noirs dans sa troupe de troubadours politiques. Des mauvaises langues soutiendront qu’entre eux, ou plutôt, certains d’entre eux, et lui, c’était d’abord une vile affaire de sous. Vous me soutenez et vous me présentez la facture. Une fois la dette épongée, en espèces sonnantes et trébuchantes ou par rétribution en nature par privilèges et prébendes interposés, il n’ y a plus lieu de parler ou de revendiquer quoi que ce soit.
Le long silence de certains de ces acteurs de la « transaction » et leur engagement dévoué dans la majorité présidentielle témoignent de la proximité, voire de la complicité entre Aziz et cette élite. La situation financière et matérielle de cette dernière avait bel et bien changé, en bien ; si ce n’est très bien. Mais celle-ci n’a pas eu le temps d’avaler et de digérer « ses sous » qu’elle se rendit compte que l’élève était fin et surtout, avait pour phare, ou plutôt, pour exemples, la politique de Ould Taya. Le président Mohamed Ould Abdel Aziz qui a longtemps servi auprès de ce dernier, l’admirait. Inconsciemment… Ses actes puisaient en grande partie de la sève des actes de Ould Taya.
Surtout dans le domaine de la gestion des rapports interethniques. Spécialement ceux relatifs aux « règles non écrites » régissant la « place qu’il faut réserver aux noirs dans le dispositif du système », quelle que soit, par ailleurs, la sincérité de leur engagement aux côtés du maitre du moment.
Jouant sur tous les registres sentimentaux, surfant sur la naïveté décapante de certains cadres et intellectuels noirs, agitant les promesses et les demi-« gestes », il endormira, avant de la déstabiliser, la vigilance des méfiants parmi les activistes noirs du pays. Les timides actions refusant les premiers actes jugés discriminatoires posés par le système, notamment le fameux « génocide biométrique » de l’état-civil, sera étouffé dans l’œuf ou maté dans le sang à Nouakchott, Maghama et Kaédi.
Bombardant trois de ses fidèles lieutenants noirs au rang de généraux, il fera de ces étoilés sans autorité, ni envergure la forêt qui cache les pratiques immondes du système contre la communauté noire. Par eux, il liquidera le passif humanitaire dans des conditions humiliantes et malsaines, loin de répondre aux devoirs de vérité, de justice et de réparation équitable.
Par eux, il justifiera l’adhésion supposée et l’implication présumée des noirs dans ce qui se fait dans le pays, alors que tout donne l’impression que tout est fait à leur détriment, si ce n’est contre eux ! Comme les leaders politiques qui avaient été gracieusement servis, les officiers noirs auront leur part du gâteau Mauritanie, abandonnant à leur sort leurs compatriotes.
Exclus des hauts rangs de la Fonction publique, de l’armée, de la garde et de la gendarmerie ainsi que de la police et de la magistrature, le reste de ces laissés pour compte ne diffame point quand il évoque un « racisme d’Etat » ou un apartheid combattu par la charria et par la loi, mais réalité dans la pratique quotidienne.
Comme si tout cela ne suffisait pas, le régime Aziz a recyclé les tortionnaires et bourreaux cruels des années de braise, en les propulsant, un à un, à la tête des services de défense, de sécurité et du commandement administratif. Comble du sadisme, dans ses dernières manifestations, il a réactivé les cellules de répression qui agissaient, indistinctement, durant les plus sombres années de Ould Taya contre les citoyens cibles. Les rafles sur faciès ont massivement refait surface dans les zones à forte concentration de noirs. Une décision inédite portant expropriation ciblée des lopins de terres d’habitat jadis acquis par des noirs dans certains quartiers des grandes villes du pays (Arafatt, Ryad et El Mina à Nouakchott) est minutieusement exécutée par l’ADU.
En milieu rural, l’expropriation des domaines agricoles et des aires de pâturages et leur octroi illégal à des allochtones ou à des étrangers s’accélère. Les brimades contre les populations qui osent s’insurger contre tant d’injustices et de discriminations comme à Boghé, Dar El Barka et Thiambène, sont désormais supervisées par les sécuritocrates commis par le système, le cas échéant, membres de la garde rapprochée présidentielle.
L’abandon, si ce n’est la mise à mort programmée de Djiby Sow en est aussi une autre illustration. Le plus choquant est que l’Opposition (remarquez le grand O) semble se taire, voire se complaire avec les pratiques du système contre une partie du peuple au nom d’on ne sait quoi !
Il faut bien le dire, les sales temps continuent des plus belles pour les noirs de Mauritanie. Ce sera jusqu’à quand ???? »
Amar Ould Béjà
lauthentique
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