L’immunité n’est pas l’impunité
Il y a longtemps que l’actualité du parlement mauritanien – devenu monocaméral depuis la suppression du sénat, en 2017, ne sorte du cadre de l’adoption de projets de loi proposés par le gouvernement. Depuis 72 heures, on ne parle que de la procédure de levée de l’immunité d’un « dépité » « indépendant » que l’on accuse d’avoir transgressé et la loi et les bonnes mœurs en transposant le « contenu » blasphématoire d’une copie du bac dans une « fiction » très allusive touchant, selon ses pairs et l’avis de la majorité de l’opinion publique nationale, à l’honneur de la plus haute autorité de l’Etat. Ainsi dit, le problème est en train de devenir une affaire d’Etat, mettant aux prises la majorité et l’opposition. Si cette dernière réclame le maintien de l’immunité du député mis en cause, la première affirme que l’impunité ne peut, en aucun cas, être un passe-droit.
Au nom de la loi, l’immunité du député est ainsi remise en cause, comme ce fut le cas pour l’article 93 par lequel l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz a voulu faire sien « le tout est permis » nietzschéen, ce qui allait laisser la porte ouverte à toute sorte d’agissements.
Au nom de l’Islam, les Mauritaniens veulent mettre un terme à cet « accaparement » idéologique que certains « pécheurs » en eau trouble utilisent, à dessein, pour mettre à l’épreuve la foi de 4 millions de musulmans. Faire le buzz, en politique, au sein de l’Assemblée nationale, ou sur les réseaux sociaux, est devenu le sport favori de personnes qui ne s’embarrassent pas de scrupules pour attirer l’attention sur ce qu’elles disent ou ce qu’elles font.
Au nom de la République, il faut rendre justice, indépendamment de la personne attaquée, président de la République, ministre ou citoyen lambda. C’est la particularité de ce mode de gouvernement que d’être impartial dans l’application des règles qui le régissent.
Au nom de la démocratie, le pouvoir législatif doit faire preuve de son indépendance, vis-à-vis de l’Exécutif et des considérations sociales qui pourraient établir une sorte de privilèges à un citoyen et pas à un autre. Ce serait un dangereux précédent que dire « passons ! », quand la personne incriminée fait prévaloir son statut de « chikh » (chef de tribu) ou de cheikh (marabout).
Ce qui n’a pas été permis à un ancien président de la République, au nom de la loi, ne doit pas l’être à un « dépité » fraichement élu, inaugurant son mandat par une provocation qu’aucun citoyen honnête, aucun démocrate, ne saurait tolérer. L’immunité n’est pas l’impunité.
Sneiba Mohamed